Plantes et Santé Le magazine de la santé par les plantes

Un nouveau regard sur les invasives (6/7)

Elles viennent d'ailleurs et dérangent notre conception de la biodiversité. Les plantes dites invasives prospèrent là où elles ne sont pas invitées et sont rebelles aux tentatives d'éradication. Une vitalité que l'on accuse de nuire aux plantes autochtones, à l'agriculture et même à la santé pour certaines. Et si, au lieu de les traiter en ennemies, on écoutait ce qu'elles ont à nous dire sur notre monde ?

Berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum)
Berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum)

La berce du Caucase, une géante riche en protéines

Cette plante superbe est pourchassée à travers l’Europe. Le bruit court même que la berce du Caucase est toxique, ce qui n’est pas tout à fait vrai… Il faut lui rendre justice.

En 1880, le botaniste italien Carlo Pietro Stefano Sommier et son collègue suisse Émile Levier explorent le Caucase occidental. Ils y découvrent, dans les lisières des forêts montagnardes, une plante géante qu’ils dédient à Paolo Mantegazza, le médecin italien qui découvrit le principe actif de la coca. Le nom pour désigner cette ombellifère géante, Heracleum mantegazzianum, fait aussi référence à Héraclès, héros de la mythologie.

La berce du Caucase fut introduite comme curiosité végétale en 1917 au jardin royal botanique de Kew, dans la banlieue de Londres, où elle prospéra. La culture en était facile et sa taille impressionnait les visiteurs. Elle fut donc propagée dans de nombreux autres jardins et devint populaire en Europe et en Amérique du Nord, d’autant qu’on l’appréciait comme fourrage pour le bétail, voire comme plante mellifère. La berce du Caucase est aujourd’hui répandue à l’état subspontané, après s’être échappée des cultures, dans une grande partie de l’Europe centrale et occidentale.

Valoriser des algues invasives en bioplastiques

Dans les Antilles, depuis près d’une décennie, des microalgues brunes appelées « sargasses » (Sargassum) ont envahi le littoral caribéen et se multiplient à la surface de la mer sur des dizaines de kilomètres. En séchant, elles dégagent une odeur proche de celle de l’ammoniac qui va jusqu’à générer des nausées et vomissements. Mais elles gênent aussi la pêche et salissent les ports et les plages. L’entreprise bretonne Algopack, pionnière dans la fabrication de plastiques à base d’algues, s’est mise au défi de revaloriser ces algues brunes invasives en plastiques végétaux. C’est chose faite aujourd’hui, avec le développement de procédés permettant d’obtenir un plastique composé à 20, 50 ou 100 % de ces algues. La filière mise en place réachemine notamment les algues vers l’usine de transformation de Saint-Malo en utilisant les bateaux d’approvisionnement des Antilles, qui reviennent généralement en métropole pratiquement vides. Ces bioplastiques servent ensuite à fabriquer des stylos, montures de lunettes, mugs, emballages, ou encore urnes funéraires, et ceux composés à 100 % de sargasses sont de surcroît compostables.

Comme elle se répand seule, sans demander l’autorisation à qui que ce soit, on la déteste, et l’on souhaite ardemment l’éliminer. Il est vrai qu’elle a parfois tendance à s’étaler avec ses immenses feuilles. Mais sa « nuisance » sur la biodiversité reste tout à fait modérée. De plus, elle est comestible. Ses feuilles sont riches en protéines complètes équilibrées en acides aminés essentiels, en divers sels minéraux et oligoéléments – fer et magnésium en particulier –, en vitamine C et autres vitamines, ainsi qu’en antioxydants, dont des flavonoïdes.

Et ce n’est pas tout : comme le céleri et le citron, la berce du Caucase renferme des furanocoumarines issues du métabolisme secondaire de la plante, qu’elle met à profit pour repousser certains prédateurs qui seraient heureux de la grignoter. Or ces substances sont photodynamisantes. C’est-à-dire qu’une personne qui frotte ses bras nus sur la plante court le risque, si elle s’expose par la suite au soleil, de voir survenir sur les parties concernées des cloques qui se transformeront en brûlures spectaculaires. Et si, comme cela s’est produit, un individu décide un beau matin d’été de passer la plante à la débroussailleuse pour s’en débarrasser, vêtu d’un simple short, il y a fort à parier qu’il se retrouve le soir à l’hôpital et fasse le lendemain la une des journaux locaux… qui bien sûr accuseront le végétal d’avoir projeté son suc et réclameront aux autorités son éradication. Il serait pourtant nettement plus simple de se couvrir : l’éducation est la mère de la sécurité.

Recette de gratin aux feuilles de berce du Caucase

Comme ses cousines (150 espèces environ en Europe), la berce du Caucase se cuisine. Une seule feuille peut suffire à nourrir une grande tablée ! Mais sa saveur est puissante et elle doit être blanchie au préalable.

Pour un gratin, faites bouillir les feuilles grossièrement coupées, égouttez-les et hachez-les. Disposez des oignons au fond d’un plat avec de l’huile d’olive et recouvrez-les des feuilles de berce et de pommes de terre en rondelles. Salez, ajoutez un hachis d’ail, de la crème de soja et versez un peu de bouillon. Saupoudrez de fromage râpé et mettez au four à 180 °C pendant 30 minutes.


Plus d'informations sur le site de l'auteur : https://couplan.com/
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